L’expression sentimentale dénuée de rationalité conduit à l’étroitesse d’esprit et aux dogmes. Ainsi, la psychologie collective d’aujourd’hui est manipulée par trois sentiments fondamentaux – le géo-sentiment, le socio-sentiment et le sentiment humain. Le premier est axé sur une certaine région géographique, d’où le terme « géo-sentiment ». Il peut pénétrer et affecter différents niveaux de la société, comme le politique, le religieux, l’économique etc. Par exemple, nombre de religions sont persuadées que leur pays est le pays de Dieu. Certains dirigeants religieux manipulent le géo-sentiment en sanctifiant un endroit particulier, et en définissant la meilleure direction pour la prière; ils ordonnent que les pèlerinages se fassent dans certains « lieux saints », sans tenir compte des « lieux saints » des autres. Autant de comportements qui nourrissent la pensée irrationnelle.
Les géo-sentiments sous-tendent l’exploitation matérielle. En effet, l’impérialisme et le colonialisme sont partiellement l’expression d’un géo-sentiment. Sous son influence, même les gens capables de la plus grande compassion envers leurs compatriotes, n’hésiteront pas à affamer et à saigner à blanc les populations d’autres régions. De tels sentiments de groupe justifient toutes sortes d’exploitations. Ce type de pensée étroite est une sérieuse faiblesse mentale souvent alimentée par les politiciens ou par le pouvoir financier pour maintenir leur pouvoir et leur influence.
Mais les socio-sentiments sont encore plus dangereux. Centrée sur le sentiment de supériorité de sa propre société, la croyance que sa nation, race, religion ou mode de vie sont meilleurs et doivent être imposés aux autres, conduit à l’oppression du faible par le fort. C’est la raison pour laquelle les minorités sont tant exploitées partout dans le monde. La supériorité culturelle est l’une des expressions principales d’un socio-sentiment imposant son art, sa littérature et sa langue à d’autres. Sans même essayer de comprendre ou d’apprécier une autre culture, le socio-sentiment l’a déjà cataloguée comme inférieure, étrange, etc. On peut observer un tel phénomène dans l’attitude des occidentaux par rapport aux cultures des pays du tiers-monde. Les langues des différentes peuplades sont décrites comme vulgaires, inférieures à la langue des colons, et sont interdites dans les écoles locales. De plus, la socio-religion déclare un peuple particulier comme étant le peuple de Dieu, et leurs écritures comme étant la véritable parole de Dieu. Il est facile de voir que les différents socio-sentiments peuvent avoir des effets beaucoup plus néfastes que les géo-sentiments.
La troisième catégorie de sentiments est le soi-disant sentiment humain, ou humanisme. Tentant de dépasser la vision limitée des sentiments décrits précédemment, l’idée d’humanisme fleurit. « Tous les êtres humains, avec leur similitude d’esprit et de sentiments, ont les mêmes droits fondamentaux. » Le seul défaut d’une telle approche est qu’une personne, après avoir loué dans un discours éloquent les vertus de l’humanisme, manquera totalement de respect pour d’autres créatures vivantes. En mangeant de la viande, en portant de la fourrure ou en achetant d’autres produits d’espèces en voie de disparition, cet humaniste a un sentiment pour l’égalité humaine, mais il ou elle ne voit pas que les animaux souffrent également. Ne devrions-nous pas étendre cette responsabilité aux plantes et même à la matière inanimée? Lorsque nous en sommes capables et que nous appliquons cet esprit humaniste à toutes les créatures vivantes, puis au monde inanimé, nous commençons à adopter un sentiment universel qui peut être appelé néo-humanisme – un nouvel humanisme prenant son inspiration dans la spiritualité. Car ceux qui chercheront la connaissance intérieure seront remplis d’amour pour la création entière, et posséderont certainement un amour inné pour tous les êtres vivants, ainsi qu’un sens de responsabilité envers l’environnement.
Si nous voulons progresser aujourd’hui, il est absolument nécessaire de dépasser les limitations des géo-sentiments, des socio-sentiments et même des sentiments humanistes. La dissémination d’un savoir impartial est primordiale. De façon à libérer nos esprits de ces sentiments dogmatiques, le concept d’égalité sociale doit être embrassé en masse. Et la seule façon d’y arriver est que les intellectuels s’organisent pour informer et éduquer la population. Jusqu’à présent peu d’intellectuels sont engagés dans un tel travail humanitaire. La plupart ne s’intéressent qu’à conserver leur position élitiste. D’autres, bien que participant activement à diverses activités sociales, sont forcés de se mettre à la solde d’exploiteurs capitalistes. Il est grand temps de cultiver « l’intellect bienfaisant » – un intellect utilisé pour le service et l’élévation de la société. Ceux possédant une telle grandeur d’esprit devraient être conscient de la portée de leurs actions et utiliser leur discernement pour aider les gens à surmonter leurs sentiments irrationnels. Il leur serait également possible de dénoncer l’exploitation sociale, politique ou économique. Car aujourd’hui, un tout petit nombre de ces intellectuels bienfaisants suffit pour influencer considérablement la société. Quiconque peut développer à la fois un esprit de néo-humanisme et un intellect bienfaisant, devient un atout inestimable pour la société. La TUP s’intéresse à la formation de tels individus, ainsi qu’à leur placement à des positions de pouvoir.
Le système éducatif devrait être remodelé pour promouvoir le néo-humanisme, et une telle éducation devrait être la plus grande priorité de la société. Elle devrait être accessible à tous et gratuite. Dans le système tupiste, les éducateurs auraient un statut égal à celui des juges, car ils forment, avec l’aide des parents, la véritable fondation de la société. Aujourd’hui les professeurs sont négligés par la société. Ainsi, dans certaines parties des Etats-Unis, les professeurs gagnent moins que les équipes de nettoyage – sans vouloir déprécier l’importance de ces dernières. De même, ceux qui travaillent dans la protection de l’enfance gagnent de 2$ à 6$ par heure, ce qui les place dans la catégorie des travailleurs pauvres. Inutile de mentionner que dans de telles conditions, seuls les plus dévoués s’engagent dans ces filières.
L’éducation doit libérer les gens de tout sentiment étroit et promouvoir une vision universelle. Elle doit s’occuper particulièrement de développer toutes les potentialités humaines, à savoir les facultés d’apprentissage et moteur sensorielles, créatives et analytiques, maturité socio-émotionnelle et moralité universelle, connaissances pratiques et théoriques et ceci dans toutes les branches du savoir. Le but principal de l’éducation néo-humaniste est d’inculquer respect et amour envers tous les êtres vivants de notre univers. Tout développement intellectuel qui ne s’ancre pas dans de telles valeurs est toujours utilisé à des fins égoïstes ou destructrices. Que l’éducation commence par former des êtres humains moraux, et ces individus suivront facilement le chemin de la spiritualité universelle pour devenir les plus grands atouts de la société.