Dialectique du cycle social

Le cycle social avance en une rotation perpétuelle. En se fondant sur les traits psychologiques des différentes classes (varn’as), il est possible d’identifier toutes les ères qui ont constitué l’histoire des différentes sociétés de notre monde. Comme nous l’avons vu, chacune de ces époques se caractérise par la domination sociale et administrative d’une des classes. En conséquence, les modes de pensée de la classe dominante déterminent les valeurs et la psychologie sociale de l’époque. Nous pouvons également remarquer qu’à tout moment donné de l’histoire d’une société, une seule classe est dominante. Au cours de l’histoire humaine, quatre époques différentes ont été identifiées; les ères shu’dra, ks’attriya, vipra et vaeshya. Ensembles, elles constituent une complète rotation du cycle social.

Au sein d’une même rotation, l’apparition des phases de naissance, maturité et mort des ères successives, se fait en fonction d’une dialectique bien précise. Il est possible d’évaluer la durée de vie d’une époque, ou de n’importe quelle structure sociale à l’aide du graphique suivant :

En fait, l’avancée du cycle social, loin d’être constante ou régulière, est plutôt de nature systaltique. En d’autres mots, des périodes de mouvement de la société seront suivies par des temps relativement plus calmes, dit « de pause ». Ainsi, lorsque la société se trouve dans un état stagnant, avec peu de vitalité ou de positivisme, on dit qu’elle a atteint sa période de « pause systaltique ». C’est au cours de telles périodes, lorsque la souffrance devient insupportable, que surgissent inspirations et idées nouvelles, toutes fortement antithétiques au système en place. Quand une telle « antithèse » devient suffisamment forte, le dynamisme de ses idées change radicalement la structure sociale existante. La TUP appelle cette phase initiale de changement et de dynamisme « mouvement manifeste ». Quand une nouvelle forme de société, « la synthèse », est achevée par la force du mouvement manifeste, la phase d’ « immobilité manifeste » prend place. Cette pause représente l’apogée du mouvement social, son âge d’or ou sa période de vitalité maximum. La force de cette synthèse dépend des concepts sur lesquels elle s’ancre. Eventuellement, elle aussi commencera à se désintégrer, parce que la classe dominante se met à exploiter systématiquement les autres classes, amenant l’oppression, la stagnation et finalement le déclin de l’ère. Cette chute culmine dans la phase d’ « immobilité systaltique », pendant laquelle de nouvelles idées se forment, et la pression monte pour le changement d’ordre. En fait l’immobilité systaltique du vieil ordre, est identique à l' »immobilité retardée » du nouvel ordre.

Ainsi, chaque âge du cycle social commence par une phase dynamique formatrice, pendant laquelle une nouvelle vitalité s’infuse dans la structure sociale. La société atteint ensuite un sommet soutenu, suivi par le déclin et une période statique, accompagnée en général d’une exploitation féroce. L’antithèse de la pause systaltique émerge donc du varn’a dominant la phase suivante du cycle social.

Types de mouvements sociaux

Ce modèle général comprend toutes sortes de petits changements et de fluctuations, (thèses et antithèses), qui n’altèrent pas notablement le tissu social et politique. En revanche il comporte aussi des périodes de changements plus substantiels, qui sont appelées « évolution sociale » ou « contre-évolution ». Ici, l’évolution décrirait des périodes de changements sociaux progressistes, alors que la contre-évolution indiquerait l’opposé, – des temps de retour en arrière (soit un mouvement régressif du cycle social). Les mouvements pour l’égalité des droits, ou les mouvements féministes des Etats-Unis, sont de bons exemples d’une évolution sociale normale. Quant à la contre-évolution, un exemple en serait peut-être la révolution culturelle de la Chine maoïste, pendant laquelle la classe ks’attriya dominante mit fin à la bourgeonnante classe vipra (les « petits bourgeois »), empêchant momentanément la transition vers l’ère vipra.

Parfois, à cause de l’application d’une force énorme, des changements dramatiques prennent place. De tels changements sont appelés « révolution » (pour une avancée du cycle social), et « contre-révolution » (pour un retour à la domination du varn’a précédent). Les révolutions ouvrières communistes sont des exemples de révolutions, parce qu’elles ont causé la démise du gouvernement vaeshya exploiteur en faveur de la révolution shu’dra. D’un autre côté, les efforts de la CIA pour empêcher la formation de mouvements d’indépendance au Mexique et en Amérique du sud, représentent une contre-révolution.

Cependant, toutes les contre-évolutions et les contre-révolutions ne peuvent durer bien longtemps. En effet, le mouvement naturel du cycle social ne peut être bloqué indéfiniment. Rappelons que, selon cette théorie, la marche en avant du cycle social est inévitable. Tout contre-mouvement est donc essentiellement régressif, en ce qu’il conduit la société à un stade stagnant et dégénéré du cycle social.

L’influence mutuelle des civilisations

La société humaine comprend un grand nombre de factions, nations, états, civilisations passées et actuelles. Il se peut que ces civilisations et sous-civilisations se trouvent à des phases de développement différentes, et leurs contacts mutuels affectent le mouvement de leur cycle social. Par exemple, nombre de sociétés qui traversaient une ère principalement vipra, se sont rapidement transformées en sociétés vaeshya, sous l’influence du colonialisme (par exemple l’Inde). Ce type d’influences réciproques rend l’analyse du cycle social beaucoup plus complexe. Et ceci particulièrement à notre époque qui connaît un rapide développement des échanges et communications internationaux. Ainsi, la plupart des nations du monde ont été profondément affectées par l’ère vaeshya occidentale, au travers tout d’abord du colonialisme, puis de l’économie de marché multinationale actuelle. Même les pays communistes et les ex-nations communistes ont été sérieusement affectés.

A cause de la globalisation de l’ère vaeshya occidentale, le prochain âge ks’attriya, tout en effectuant une cassure avec l’économie globale, (au travers de luttes pour la décentralisation du pouvoir économique), conservera cependant probablement son élan vers une culture humaine mondiale.

Révolution sans effusion de sang

Selon la TUP, la mort structurale d’un système social n’implique pas automatiquement la mort d’êtres humains. Il est théoriquement possible de voir un système totalement nouveau, naître de la chute d’un vieil ordre, et ceci sans qu’une seule goutte de sang ne soit versée. Une telle « révolution sans effusion de sang » aurait lieu seulement si un ajustement vibratoire est possible pendant la période d’assimilation. En d’autres mots, si la classe dirigeante du vieil ordre est disposée à renoncer à suffisamment de richesses et de pouvoir pour répondre aux besoins de l’âge nouveau. Plus la classe dominante du vieil ordre s’approche de cet idéal, plus les structures collectives et individuelles du nouvel âge gagneront en vitalité.

Le rôle des individus dans le processus de transformation sociale

Une société se compose de nombreux êtres humains, chaque individu possédant une « vibration » unique, reflétant l’unicité de sa structure corporelle, de son mode de pensée et de ses actions. La société possède également une vibration particulière, qui est la résultante de toutes les vibrations individuelles. Ces dernières sont fortement influencées par la vibration collective. Il est donc impossible pour un individu de se mouvoir exclusivement en fonction de sa motivation personnelle. C’est pourquoi certains cherchent l’harmonie avec la vibration collective, alors que d’autres essaient de « vibrer » plus vite ou plus lentement qu’elle. Dans tous les cas, la société avec ses règles, décrets, moeurs etc. ralentit le mouvement et l’expression individuels.

La longueur d’onde de cette vibration collective est plus courte que celle des individus, et cette différence motive les phénomènes d’évolution et de révolution qui prennent place lorsque le nombre d’individus voulant le changement social augmente.